384                         HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
Les taxes énormes qui frappaient les tapisseries d'Audenarde à leur entrée en France, et s'élevaient jusqu'à 66 pour cent de leur valeur, équivalaient à une prohibition absolue. En outre, le loge­ment des gens de guèrre faisait peser sur les populations des charges fort lourdes et les exposait à des vexations continuelles. Tous ces motifs réunis expliquent la désertion en masse des habitants, malgré toutes les mesures prises pour empêcher leur départ.
Cependant les magistrats ne perdent pas courage. Ils lutteront jusqu'au bout. Les clients manquent ; ils feront travailler les tapis­siers pour le compte de la ville. En 1694, le gouverneur général des Pays-Bas, Maximilien-Emmanuel de Bavière, reçoit encore des magistrats d'Audenarde une chambre de tapisserie payée 1,950 livres à François van Verren. De temps en temps, des pièces étaient ache­tées pour la décoration des salles de l'hôtel de ville.
En 1700, le métier est réduit à dix maitres. Sept ans plus tard, la maison de la corporation est vendue. Trois chefs d'atelier travaillent encore en 1749. Ils se réunissent pour la dernière fois le 1°- décembre 1758.
Le dernier entrepreneur d'Audenarde, Jean-Baptiste Brandt, arrête sa fabrication en 1772. LT devait survivre vingt-quatre ans à la fermeture de son atelier.
Tournai. — A Tournai, comme à Audenarde, les magistrats prirent de sérieuses mesures pour la protection de l'industrie lo­cale, et firent de grands sacrifices pour empêcher sa ruine com­plète. En 1671, ils cherchent à attirer chez eux un tapissier d'En­ghien. Ils prennent à leur charge le loyer de la maison occupée par Étienne Oedins, autre tapissier d'Enghien, qui réside à Tournai de 1688 à 1692.
Jean Baert, d'Audenarde, arrivé à Tournai en 1692, jouit des mêmes immunités. La ville lui fait des avances considérables. Cest à lui qu'on commande quatre petites pièces pour fauteuils, offertes à la maréchale de Boufflers. Malgré ces avantages, l'en­treprise de Baert ne semble pas avoir réussi, car il quitte la' ville après un séjour d'une vingtaine d'années. Il va d'abord tenter la fortune à Torcy, près de Paris, en 1711; nous avons signalé plus haut cette tentative. En 1724, Jean Baert est fixé à Cambrai. Ainsi qu'on le verra plus loin, il n'y a pas de doute sur son i den-